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L’anthropologie structurale existe-t-elle et si oui, est-elle vraiment structurale?
La question se pose.
Claude Lévi Strauss en a un peu emporté le rêve dans sa tombe.
Pas complètement.
L’un de ses élèves (et sûrement plusieurs), Philippe Descola, a proposé un graphique digne du schématisme kantien de l’entendement pour expliciter les types de sociétés possibles, les types de comportements ethniques, les types de groupes sociaux qu’on a pu rencontrer dans la nature mourante de l’homme.
Lévi Strauss a rêvé toute sa vie de découvrir l’algorithme du comportement humain ou de la société humaine de base, tout en reconnaissant l’immense variabilité des témoignages ethnologiques et anthropologiques.
Il a incontestablement dégagé des règles possibles, mais dont les caractères transcendantaux pouvaient rester décevants pour un philosophe.
On ne peut pas en dire autant de Philippe Descola dont les élaboration ethnologiques débouchent sur une vision structurale assez grandiose des types possibles de sociétés passées que je me suis donc permis d’intégrer à mon délire structural.
L’ethnologie est une science curieuse dés le début, puisqu’elle postule l’étude de l’autre civilisation de la part d’une civilisation qui ne s’est pas forcément focalisée bien longtemps sur l’étude de ses propres traits et fonctionnements.
Étude des mythes, étude des rites, considérations sur l’histoire, études des conditions territoriales d’existences des corps humains et de leurs comportements, l’anthropologie se tient à très légère distance de la psychologie, des questions portant sur la subjectivité, de la métaphysique, et bien-sûr de la philosophie.
Son existence en tant que science du développement et de la spécificité humaine me semble mise en question par toutes les excroissances de la sociologie, mais aussi par toutes les « psychologies » qui lui ont fait d’une certaine façon, concurrence.
Est-il important de réfléchir l’enfance de la civilisation, et n’est-ce pas une façon pour elle de se persuader qu’elle est adulte, si toutefois, elle n’est pas mourante?
Mais même le serait-elle, cela ne l’empêcherait pas de rester infantile dans ses croyances.
L’anthropologie en général et l’ethnologie en particulier, sont devenues des « sciences de vulgarisation » du narcissisme occidental positif postulant sa capacité à connaître positivement ses « autres », ses correspondants sauvages et barbares, si ce n’est « premiers », au détriment semble-t-il de toute la dimension autocritique de la sociologie qui s’est pourtant développée dans le même temps et dans des sphères intellectuelles proches.
Et nous restons médusés par les grandes questions qu’elle se persuade de soulever :
A-t-il existé un matriarcat?
L’interdit de l’inceste est-il un invariant structural « transcendantal »?
Le désir humain (pléonasme) suppose-t-il la structure de la subjectivité?
Les lois du sol et celle du sang sont elles conditionnées par des structures mentales synchroniques ou par des faits diachroniques d’histoire?
Les mythes sont-ils antécédents ou postérieurs à la raison?
Peut-on « analyser » un mythe?
Etc.

Toutes ces questions sont des questions de vie ou de mort pour l’esprit « moderne », aux deux sens de la phrase.
L’esprit ne peut survivre sans se les poser. Il ne peut être esprit sans se poser précisément ces questions, avec quelques autres, en particulier celles de Kant. Mais ce sont aussi des questions sur la vie et la mort.
Toute conception de l’esprit va aussi plutôt dans le sens de l’aristocratie.
L’esprit, même celui des morts, n’existe peut-être que comme signe distinctif du groupe dans lequel il est fait référence à l’esprit. Cela poserait alors la question de la façon dont chaque esprit peut connaître les conditions collectives de ses propres fonctionnements. Et alors il se pourrait que toutes ces belles questions soient aussi des creusets pour l’être social, des « places », des « fonctions sociales », des fictions de connaissances, des hochets scientifiques et distinctifs, ces mêmes fictions qui garantiraient les positions de parole dans le champ de la reconnaissance politique.

Un anthropologue est toujours au moins dans l’esprit un explorateur distingué, un chercheur un peu détaché de son propre territoire mental et politique.
Il n’y a pas d’anthropologie pragmatique. C’est la sociologie qui constitue l’ethnologie pragmatique pratiquée sur place, mais ne résistant pas au plaisir d’appliquer les recettes et les formules d’une anthropologie vécue comme « histoire naturelle des autres sociétés », ce qui lui fait courir tous les risques de dérive romantique et de généralisation abusive.
C’est pourtant quelque chose comme cet abus que je tente d’instiller au système scolairement acquis de la raison positive que je peux posséder pour mon propre compte, quand je postule l’existence et la persistance des structures immanentes d’un schématisme de l’entendement rationnel européen hégélien mais déjà largement repérées par Kant dans une analyse des conditions de la raison qui n’avaient encore rien de sociologiques. Et Dieu sait que l’anthropologie de Kant n’est pas son ouvrage le plus limpide et le plus innocent.
Cette question se pose à moi plutôt dans les termes de l’impossibilité de s’abstenir : Peut-on s’abstenir de dégager la structure ou le schéma d’une raison qu’on utilise pour réfléchir la structure ou son absence. Ca pourrait sentir son Sartre. Si c’est ça, tant mieux.

Mais au-delà d’une philosophie ou d’une phénoménologie de l’existence du sujet et du sujet de l’existence, il se pose la question plus triviale de l’argumentation combattante : ces théories sont aussi des groupes, et des groupes de représentation, c’est-à-dire des groupes de pouvoir, des lobbys intellectuels, des écoles, des groupes de pression, d’influence.
Alors comment penser à la fois la liberté et la structure?
L’une comme l’autre ne sont pensées que lorsqu’elles veulent bien se laisser penser.
Ce sont des femmes. Elles se complètent mais elles ne s’entendent pas.
Entre les deux se situe la psychopathologie, elle-même signe et garant de structure, et elle-même signe et garant de liberté. Androgyne.
C’est ce que j’ai voulu rappeler dans ces tableaux du monde social qui sont « un » tableau du monde social troué.

La pathologie des « sujets » et la pathologie de « positions » sont constituées de ce qui rapproche chacun du sentiment du vide et de la chute. La pathologie est aussi ce qui fait exister l’être « en soi et pour soi » du sujet comme de ses représentations. On ne sait de quel côté situer son essence.
Je parle bien-sûr ici de la pathologie de l’esprit ou du psychisme. La maladie du corps pourrait aussi bien être engagée dans l’affaire dans la mesure où la pathologie mentale peut se concevoir comme l’ensemble des situations où la distinction corps esprit pose problème.
La folie de chacun constitue son seul réservoir de liberté, mais la folie de chacun le place à un endroit repérable structurellement dans quelque chose du schématisme de l’entendement occidental.

La folie de l’être-corps pensant et parlant d’occident le dispose dans un tableau un peu comme ceux de Sade, qui le branche à son prochain ou à sa prochaine selon les règle d’un organigramme dans lequel on ne peut pas tout faire, même si on en a le désir, dans lequel certains ont plus d’aptitudes que d’autres à régenter le tableau, et dans lequel la fonction du fantasme est structurellement organisée. La différence entre Sade et le champ social c’est la différence qui existe entre le fantasme et le désir. Sade met en scène ses fantasmes. La folie de chacun met en scène ses désirs. La perversion va vers l’entropie par une action sans désir exprimant directement le fantasme. Elle passe par l’extérieur de la structure et de la loi, qu’elle contourne et dont elle s’éloigne, ce qui ne constitue pas une liberté mais un oubli, un abandon, une « forclusion ». Tout ça par et pour un culte de la « nature » qui lui permet de récupérer les bénéfice de l’érotisation des lumières de la « loi naturelle ». La psychopathologie par contre, va vers l’entropie par la chute. Elle produit de la liberté en maintenant l’être dans les conditions de la structure. Elle produit des désirs à partir des fantasmes qui constituent le « sujet » dans son environnement  « intersubjectif », expression qui hérissait tant Lacan.

Le fantasme de Sade a été de réaliser le branchement généralisé des citoyens et citoyennes de la République sans être encombré par les règles pseudo-transcendantales de la morale des prêtres et des bourgeois de son époque. Il en a proposé une formule en supprimant radicalement tout référent structurel en dehors de l’ordre monarchique (qui peut certes faire office de « nom du père » mais pas garantie de raison sociale). C’est un monde dans lequel il n’y a pas de possibilité d’être fou si ce n’est le fou du roi que Sade cherchait vaguement à parodier, mais de façon très sérieuse.

L’anthropologie stipule la connaissance d’une entropie pathologique des états des êtres en sociétés. La pathologie est le passage par où un être se désengage de son fantasme et des désirs qu’il génère. Il n’y a que deux voies de désengagement : la psychopathologie et la perversion. Dans tous les cas l’équilibre de l’être en société est rompu. Il en a trop vécu. Il entre au purgatoire du sujet de la parole et de la pensée, sans phrases. C’est ce qui explique qu’il y a un dessous des cartes, un derrière du rideau, une zone étrangère où les deux mondes antinomiques de la maladie et du mal se rejoignent.

Cette structure topologique extrêmement simple (dedans, le pathos, dehors, la perversion) est celle du  « tore » de la topologie où elle s’illustre en une bouée de sauvetage. C’est effectivement de bien se cramponner à son bord, au bord du baquet qu’elle réalise sur le plan de consistance océanique de l’être, qu’on peut se maintenir sur des positions de « raison ».

Mais en réalité c’est bien d’une entropie au sens strict du terme qu’il s’agit. C’est l’ordre des raisons et les ordres de la raison qui sont en question dans cet équilibre. Si rien ne garanti la nomination des phénomènes dans la séquence sartrienne des apparitions, il n’y a pas de raison de parler.
Encore une fois s’il n’y a certes pas de raison que deux concepts se suivent dans le temps, il y a toute raison pour qu’ils se jouxtent sur le plan de consistance intemporel de l’être maintenant, qui est une formule on pourrait dire  « lacanisée » du dasein heideggérien. Ca le dispense des profondeurs mythique et mystiques dont ce dernier le dotait.

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