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Historiquement, le terme de paranoïa était utilisé en Allemagne tout au long du XIXe siècle pour qualifier tout type de délire. En 1879, Richard von Krafft-Ebing isole
les formes hallucinatoires (paranoïa hallucinatoria) des
autres délires (paranoïa combinatoria). Emil Kraepelin définit plus précisément la paranoïa à la fin du XIXe siècle comme le « développement lent et insidieux d'un système délirant durable et
impossible à ébranler, et par la conservation absolue de la
clarté et de l'ordre de la
pensée, du vouloir, et de
l'action. » L’article Wikipédia sur « paranoïa » est irréprochable. « Mais quoi, ce sont des
fous? » Qui sont les fous? Les fous disent-ils n’importe quoi? Qui connait le monde
depuis des positions de raisons? Les non fous? Qui peut à coup sûr distinguer l’esprit du corps? Le fou ne saurait plus
faire la distinction? Certes il est des états du psychisme dans un corps sain, qui
peinent à distinguer les générations, les parents et
les enfants, le moi et l’autre, le maître et l’esclave, l’intérieur et l’extérieur, l’individuel et le collectif. La santé mentale serait donc que la capacité à distinguer ces
limites? Mais les « normaux » savent-ils si bien faire ces distinctions? « Je doute donc je suis » : Est-ce bien si sûr? Et suis-je bien sûr de douter? Ce n’est pas moi qui doute : Ca doute en moi et
Descartes veut que j’en tire des évidences ou des certitudes. Mais le fou n’est jamais fou par son doute, bien au contraire.
Il est fou par son adhésion inconditionnelle à un phantasme de son « choix » : Descartes s’est attaqué sans notre « pertinence » mais avant la lettre, et dans une époque paléolithique par rapport à la « psychiatrie », au problème de la paranoïa ou de la psychose. A-t-il posé ce syndrome comme pathologie de la
conscience ou comme condition de la science? Que le fou soit celui
qui se pense roi pose comme exception ou comme inconcevable l’hypothèse initiale du roi fou, ou celle de la folie de
tout régime monarchique. Comment donc mon doute
pourrait-il confirmer mon existence si je ne fais foi qu’à la chose certaine et positive? Comment si je doute des
données qui me parviennent, pourrai-je ne pas
douter que des données me parviennent? Le paranoïaque disait Lacan est celui qui pense « je suis moi ». Il avait raison. C’est d’ailleurs ce qu’on appelle « avoir raison ». Il faudrait au fond
forcer le trait pour saisir le fond de l’affaire : Je n’existe que si je me trompe : il me faut révoquer en doute une évidence de MON choix, et toujours le même, à des fins de fixité du signifiant qui me détermine, afin de garantir un énoncé non révocable en doute dans mon système du jugement. C’est bien là au fond que Kant a détrôné ce postulat et la pathologie qui le soutien,
par la méthode critique : Qu’est-ce qui me garanti que mon système du jugement soit un système du jugement? Puis-je soumettre mon
système du jugement à un jugement de raison, fut-il organisé en jury de thèse ou en tribunal de la raison? Il suffit de sentir
la forte et insécure odeur de la prestance, ou parfois très assurée ce qui est plus grave, des membres de jury d’oraux universitaires ou scolaires au sens
large, pour se convaincre que souffre ici une substance particulière, peut-être pas si inétendue que ça et que Freud a immortalisée sous le nom de « narcissisme ». C’est au fond déjà cette question éternellement remâchée par la psychanalyse :
« Penses-tu vraiment ce que tu penses? » Sauf que la
psychanalyse y a apporté une toute autre
solution que celle de la critique : elle a remis en place une scholastique. Que puis-je donc
savoir? Ce qui est certain est
parfaitement certain, et ce qui est parfait est certainement parfait. Certitude, pureté, perfection, même combat. C’est cela et rien d’autre, la paranoïa. Descartes interroge en
fait plus encore que les théologiens de la
Sorbonne, les fondements intellectuels (je ne dis pas européens) de la monarchie, jamais loin en occident
de la logique profonde des monothéismes.
Quant à ce goût de Descartes pour l’onirisme et les rapports du rêve à la raison, L’évitement de la folie ne peut garantir aucune
consistance pour une raison se donnant pour projet de penser la folie. |
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