e remets donc en place un
ouvrage qui va
certainement reprendre celui de 2002 sur de nombreux points. Au début
mon
intention était de refaire quelque chose de plus synthétique ou de plus
« lisible », plus court, et donc plus utilisable par
le lecteur « en
puissance » que vous êtes en train de devenir « en
acte ».
Mais
jusqu’où ira cette action?
Et jusqu’où m’entrainera cette petite
passion d’écrire la confusion de mes propres idées.
Lorsque
rien n’est clair, un certain usage
de la discrétion devrait requérir l’abstention.
Quel est donc l’intérêt d’organiser en
écriture (encore l’expression est-elle pompeuse), un ensemble de
questions pas
toujours bien reliées les une aux autres, un ensemble de croyances pour
la
plupart encore bien incertaines, et enfin un ensemble de sentiments
rarement
compatibles avec les mœurs et les pratiques intellectuelles convenables
de
l’époque ?
Une
fois de plus c’est dire si mon propos
comme ma personne, restent profondément enlisés dans le bourbier d’une
pathologie de l’esprit. C’est incroyable, mais je ne m’en fais pas
grief.
Plus
grave encore, au fur et à mesure que
je rédige ce nouveau palier de ma petite élaboration critique, je
m’aperçois
qu’elle n’atteint pas encore le volume, sans doute peu opérant, de la
précédente, mais qu’elle a plutôt tendance à en aggraver encore les
formes
maniérées et surchargées d’expressions narcissiques, certainement
inutiles et
somme toute assez peu constructives, telles que ce propos lui-même.
lors pourquoi poursuivre?
Je crains de ne pas aspirer très
profondément à la construction voire à la fabrication de concepts, et
peut-être
même d’être par-dessus le marché, plutôt un destructeur dans l’âme, de
ce que
l’éducation m’a légué comme « concepts », pour ne pas
dire
« refilé ».
« Déconstructeur » je ne sais
pas. Et je n’y tiens pas non plus, sauf si ça veut dire attaché à une
critique
kantienne banale de chaque information et particulièrement de celles qui
impliquent le contexte de l’échange en cours ….
La
paranoïa me semble poser par définition
un regard rapetissant et peu valorisant sur les choses et les êtres du
monde,
en se consolant d’un sentiment gratifiant à l’endroit du
« sujet »,
expression décidément malheureuse.
On
peut donc penser que j’écris ici sans
liberté aucune, et que je ne fais qu’exprimer ma psychonévrose
intérieure dans
une contorsion littéraire qui n’a d’intérêt que pour moi, ne serait-ce
encore
qu’un intérêt d’ordre cathartique, c’est-à-dire un peu diarrhéique.
r
il est vrai que dans les rares lieux où le Léviathan de la Nation
supporte le débat, je ne cesse de râler (ce qui n’est pas bien), contre
les dérives de la République, de laquelle je retire pourtant
des
assurances et des garanties dont la génération de mes parents n’avait
pas le quart, et mes grands parents encore bien moins. Je dénonce ici
et ailleurs (au bénéfice d’un « droit d’expression » dont je mesure
chez moi toute l’ingratitude), les défauts de la constitution politique
et les défauts du comportement des institutions qui en découlent, à
l’encontre d’une Nation et d’une République dont je ne demande ni la
disparition (car hors mon nom je n’ai rien d’un révolutionnaire), ni
l’humiliation, ni même l’intimidation si la chose était possible, mais
à laquelle j’exprime tous les reproches qu’un psychonévrosé digne de ce
nom, est susceptible d’adresser par symptômes ou par comportements, si
ce n’est en paroles, à ses vieux parents qui n’ont pas toujours su
faire pour lui, ce qu’il fallait faire au moment où il aurait fallu le
faire.
Je
ne fais donc dans ces écrits que « râler »
ce qui n’est guère engageant pour mon lecteur, et peu efficace dans la
pratique
politique et psychologique d’une existence, du moins au regard des
bonne mœurs,
du fair play, et même peut-être du politiquement correct.
Pourtant un irrépressible conatus
narcissique (primaire et secondaire) me pousse à cette action peu
recommandable.
e m’empresse de dire que je
ne parachève
pas par ces positions, ma psychanalyse personnelle qui me semble depuis
longtemps irrécupérable, mais qu’au contraire je cherche à m’émanciper
un peu
plus de tous ces devoir et de tous ces rites d’institutions, scolaires,
universitaires, inhérents aux représentations de la fonction sociale,
que ce
soit à la hauteur des puissances de représentation de la
« vocation »
ou de l’amour du prochain, fût-il un parent, ou que ce soit au plan de
la
valeur absolue des actions psychologique, c’est-à-dire politiques que
je peux
rencontrer ou produire. Cela dit j’imagine que le parquet emperruqué de
la
psychanalyse d’institution qui sévit encore un peu dans le monde
culturel
auquel nous condamne la nécessité d’adaptation, ne manquera pas de
juger cette
démarche comme un passage à l’acte interprétable dans mon propre
système
historique et familial. Je lui en laisse tout loisir et jouissance.
Qu’il garde
aussi par devers lui, à tout prendre, ses interprétations.
Je
suis donc sensible à toute cette
pression d’une morale des comportements et des styles qui conseille de
s’abstenir de certaines critiques pour lesquelles le
«sujet normalement
névrosé » du vingtième siècle français (et de quelques autres)
avait en
définitive plus de vigueur que sa descendance, mais vis-à-vis de
laquelle on
comprend fort bien qu’une grande partie de la nouvelle génération
s’exonère
sans autre forme de procès.
Faut-il
dire dans le champ collectif de la
grande nacelle protectrice et organisatrice du « débat de
société »,
que cette protection a des caractères injustes et par ailleurs
complètements
idiots, dés lors qu’on bénéficie d’une part suffisante de ce système
social et
politique?
Je
n’en sais rien mais c’est trop tard.
Je
trouve ce monde politique tellement
stupide qu’il m’arrive de regretter d’y avoir propulsé des enfants et
que
j’aurai parfois le sentiment d’avoir à m’excuser auprès d’eux de les
avoir
embarqués dans une telle galère.
-t-on le droit d’aborder de
la sorte la
République de ses ancêtres. Faut-il préciser que je parle tout autant
de la
« République Mondiale », maintenant bien installée
malgré les
discrétions intellectuelles dont on l’affuble, que du chaleureux
hexagone
franchouillard auquel chacun va réchauffer son cœur à l’acmé des durs
moments
de désespoir de cette existence heureuse dont nous lui sommes tant
redevables.
Il
faut certes faire de grands efforts de
jouissance et de réjouissance pour parvenir à renvoyer à cette
République
l’image de famille heureuse qu’elle ne cesse d’exiger.
Je
râle car je trouve à la fois
indispensable et débile en l’état actuel des choses, le montage
politique
pseudo démocratique dont je suis censé bénéficier (sans excès et sans
facilités), et dont je vais laisser à mes enfants l’héritage (faute de
mieux),
dans des conditions de décrépitude qui posent la question de l’opinion
non pas
comme catastrophe philosophique, mais comme posant le problème d’une
raréfaction de l’air ambiant, du fait d’un état de la pensée collective
qui me
parait devenir irrespirable.
’entends bien en mon for
intérieur la
critique des âmes reconnaissantes qui pensent que de tels sentiments
doivent
raisonnablement se solder, soit par une position révolutionnaire, soit
par une
modestie soumise aux décisions du plus grand nombre.
C’est bien en définitive contre cette
pensée des bons élèves auxquels les institutions de la République des
médias,
des experts, des marchés et des cocktails, concèdent tous les
avantages, que je
m’irrite. Sauf à combler une exigence de revendication virile dans le
regard
d’une République-mère incestueuse et mafieuse, je ne vois pas l’intérêt
que
l’on peut trouver à une quelconque situation de révolution ou de
guerre, et je
trouve particulièrement stupide toute idée de révolution de la part de
quiconque reste inscrit aux bénéfices de la nation qu’il veut
transformer par
la méthode forte. Et pourtant je ne vois pas au nom de quelle morale
religieuse
ou laïque je devrais taire les jugements certes un peu contournés mais
sentis
et donc sincères, qui sont précisément ce qui me pousse à cette
écriture
paranoïaque, obsessionnelle, voire parfois hystérique, et peut-être
aussi un
peu schizophrénique.
C’est
à quoi je cède donc dans cet ouvrage.
Je ne pense pas que ce soit facile. Et je ne pense pas non plus que ce
soit totalement
dénué d’intérêt.
J’aggrave mon cas.
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